Amies lectrices et bloggeuses, vous êtes pour la plupart férues d'ouvrages manuels en tout genre et très actives en ces multiples domaines, dans la mesure de votre temps libre. Et de ce fait, vous connaissez la valeur du temps nécessaire à confectionner - ici : une layette pour une naissance - ou encore des vêtements pour vos enfants ou petits enfants - ou bien tricoter ou crocheter un pull ou un beau napperon - broder un tableau ...
D'une part, j'aimerais connaître votre opinion : qu'est-ce qui vous décide à vous lancer dans un ouvrage pour quelqu'un ?
D'autre part, je voudrais vous faire part de ma dernière expérience, que je ne jugerais pas comme étant mauvaise - chaque expérience me permettant de m'améliorer et de progresser dans l'existence - mais tout de même, je ne la qualifierais pas d'extrêmement plaisante non plus.
Il y a quelques mois d'ici, une collègue nous fait part de sa grossesse, ce qui lui vaut très naturellement moult félicitations. En papotant, elle nous apprend que le bébé sera choyé par ses grand-mères car fort attendu, et que l'une d'entre elles s'est déjà mise à l'ouvrage, comprenez au tricot, très activement. En amatrice de travaux de ce genre, j'avoue n'avoir guère de plaisir à cotiser pour un cadeau de liste (qu'elle soit de naissance ou de mariage), même si je le fais pour me plier aux usages. Mais j'aime bien compléter ma participation par quelque chose de plus personnel. Et moi qui pensais déjà avec délectation à ce futur cadeau à venir, à faire à la maman que j'apprécie beaucoup au demeurant, je me dis que je peux bien laisser tomber la case "layette" ...
Me vient une idée subite. J'avais entendu la future maman se plaindre assez rapidement qu'elle était beaucoup trop serrée dans ses vêtements normaux, et râler sur la dépense de vêtements dits "de grossesse". Aussitôt, mon "bon coeur" complément débile prend le dessus et je propose de suite à la maman de lui confectionner une robe de grosesse "si ça peut la dépanner et lui éviter une dépense coûteuse". Proposition acceptée avec enthousiame de l'autre côté.
J'interroge quant aux goûts de couleurs, je commande le tissu, je réfléchis au modèle : certes, la grossesse s'achèvera fin août, donc il faut du très léger pour s'il fait chaud, du pas collant si possible, d'autant plus que je sais fort bien que la maman n'acceptera pas de subir un essayage en bonne et dûe forme. Rien que lui extorquer ses mensurations, ce fut un petit peu "sport".
(Comme quoi, des personnes qui ont du mal à accepter leur image, il y en a partout, même des pas si grosses que ça)
Alors que j'avais entamé la confection de la robe, je remarque que la personne arbore pas mal de nouveaux vêtements de grossesse (qui pour certains n'arriveront jamais au terme car choisis sans penser à la future ampleur). J'ai juste pensé que sans doute que ces vêtements étaient moins chers que prévu, et quoi de plus légitime que d'avoir envie de se sentir bien dans du confort adapté. Mais j'ai également pensé que "ma" robe ne semblait plus avoir de raison d'être ... Je ne pouvais pas si bien penser.
Arriva l'essayage de la robe. La maman ayant demandé à pouvoir l'essayer chez elle, seule et à l'aise, je ne sais même pas si elle lui va. Elle me demande juste de la lui raccourcir très fortement.
Dernièrement, alors que je m'excusais du retard pris dans la livraison de la chose promise, la future maman me dit "oh, pas de problème, mais ... il faut que je te dise ... ne sois pas fâchée ... mais tu ne me verras jamais au bureau avec ta robe ... elle n'est pas assez "bureau", mais je serai contente de la mettre à la maison pour être à l'aise. J'ai des tas de vêtements et de vieux Tshirts larges que je suis ultra contente d'enfiler le soir venu, mais qui ne sont pas mettables pour le bureau ..."
De prime abord, j'ai tout de même ressenti une blessure d'amour-propre. Merde quoi ! je viens de me creuser à confectionner quelque chose d'adapté, avec mes petites mains et toute mon affection, pour que cela soit traité comme du caca !, pour peu, je me serais confondue avec Caliméro "c'est trop injuste !".
Et puis j'ai réfléchi ...
Je sais qu'elle a tout fait pour être la plus délicate possible mais j'ai bien compris qu'en fait, cette robe, elle la détestait.
Allez, petite pause dans mes raisonnements, on va un peu rigoler, vous comprendrez mieux la suite après avoir vu les photos.
Tout d'abord, le tissu, joli coton bleu ultra-léger, avec de fines rayures contrastées et fin lurex argent qui illuminent l'étoffe.
La photo ne lui rend vraiment pas hommage à ce joli tissu. Tant pis.
Ensuite, les images. Bien que n'étant pas enceinte, et ayant à l'origine tout plus gros que ma collègue (ventre, fesses, jambes, bras ...) je faisais au moment de la prise des mesures, la même corpulence de poitrine et le même genre de carrure qu'elle (eh lui, les seins, ça gonfle vachement en période de grossesse). Donc, à condition de faire un vêtement ample, je pouvais servir de mannequin pour l'essayage, c'était déjà ça.
(ouille j'ai le soleil dans l'oeil !) Voilà ce que ça donne. Evidemment, les fronces se situant au dessus de la poitrine (ben oui, je ne savais pas jusqu'où on prend de l'ampleur !) - Je précise qu'à part le fait que j'ai mis nettement plus d'ampleur sur le devant exprès, ceci est une tunique en taille 46, rallongée en robe, et tirée d'un magasine "fait main" de cette année, et pas un truc datant de mathusalem. La tunique n'était évidemment pas prévue pour femme enceinte, raison pour laquelle j'ai "aménagé" le devant, mais les fronces se situaient déjà à l'origine sur le dessus de la poitrine.
Sur photo, c'est chouette, mais je vous jure que quand je me suis vue dans le miroir, la première fois que j'ai essayé la robe, j'ai poussé un véritable cri de stupéfaction tellement j'avais l'air énorme au niveau de la poitrine.
Alors, vous pensez bien, ma pauvre collègue, elle qui à l'orgine a moitié moins de seins que moi, qui bien que seulement un peu enrobée en n'étant pas enceinte a déjà du mal à s'accepter physiquement, et qui pour l'instant a du mal à réaliser toutes les modifications morphologiques qu'elle subit ... à mon avis, elle a dû frôler l'évanouissement lorsqu'elle s'est vue dans la robe ...
Allez, je vous autorise à rigoler un bon coup :
J'ai préféré rire que pleurer en terminant cette robe, la grimace est plus belle ! Et tant pis si elle termine comme loque à cirer les chaussures, j'aurai été au bout de l'obligation dans laquelle je me suis engagée, quel que soit l'usage que cette robe aura.
Mais aussi, je vous jure qu'on ne m'y reprendra plus à proposer ce genre de chose ! Dorénavant et dorénarrrière, je ne ferai plus des choses que pour des personnes à qui je ferai VRAIMENT plaisir ! Et spécialement en matière de couture, je ne dois plus jamais oublier que je dois toujours refuser de coudre pour des personnes qui ne s'acceptent pas physiquement.
Car de toute façon, elles se trouveront moches dans ce que j'aurai cousu, même si j'y ai mis tout mon talent et toute ma bonne volonté.
Je vous envoie mon plus joli sourire, et mes plus belles pitreries pour vous souhaiter la bonne soirée.