Bonjour tout le monde, comment fait-il ce matin chez vous ?
Ici, il fait grand soleil frisquet mais avec un vent à décorner les bœufs. Nous habitons pourtant très très très loin d'un bord de mer.
Je suis née fin des années 60, et comme beaucoup d'entre vous, des tas de souvenirs s'entrechoquent souvent dans mon esprit, notamment en matière de design, d'habitudes, de mode de ces années-là.
Ces derniers temps, en feuilletant de vieux magasines de couture " Burda", j'ai plongé dans le passé. Et j'en suis ressortie avec la furieuse envie de réhabiliter certains modèles et certaines matières.
Lesquelles d'entre vous ont connu et porté des vêtements en "Diolen" ?
Qu'est-ce que c'est que ce brol ?
Tout d'abord, "Diolen" est le nom commercial d'une fibre de polyester (il en existe beaucoup d'autres, qui sont aussi passés dans le langage en matière textile : Tergal, par exemple, ou encore Dacron, Terlenka, Trevira ...).
Le plus souvent, actuellement, dans la bouche des gens, c'est synonyme de "tissu en jersey synthétique imprimé vieillot, terne, moche et ringard que portait tout le monde dans les années 60 et 70 et que portent toujours les bobonnes".
J'avoue, moi aussi, avant d'oser ma régression "seventies", j'avais en moi cet à priori détestable et très carré. "quoi, du Diolen ? beeeuuuurk !".
Et puis de fil en aiguille, en me penchant sur le phénomène, me voici maintenant prête à tordre le cou à cette stupide idée toute faite, et à vous faire participer à l'aventure.
Alors, vous êtes prêtes ? vous me suivez ?
Embarquement immédiat pour quelques décennies en arrière. Fermez les yeux un instant.
Et vous venez de les rouvrir dans "ces années-là".
Nous sommes habillés de tissus synthétiques. Souvent, les imprimés sont psychédéliques, géométriques ou encore remplis de fleurs. Les coloris sont parfois ternes, bruns, gris, doux, plutôt prisés par les femmes d'un âge dit "mûr" (nettement plus vite que maintenant, d'ailleurs) mais le plus souvent ils sont flashy, sur fond foncé, n'hésitant pas à barioler du rose pétant, de l'orange vif, du vert prairie, et d'autres tons encore.
Si l'on regarde nos pieds, même nos chaussures sont vivement colorées, outre leur forme particulière (bouts très ronds ou très carrés), semelles compensées et chaussures à plateaux avec de gros talons "relativement" stables. Tiens tiens, ça ne vous rappelle rien, tout ça ? Evidemment si ! c'est du seventies revisité qui hante actuellement les rayons des magasins de chaussures mais aussi d'accessoires. Tels les grands chapeaux de soleil, les immenses lunettes de soleil à montures plastiques brunes ou très colorées, les colliers à boules de couleur. D'où ça vient à votre avis ?
Il y a aussi les pantalons dont les bas s'évasaient très fort, forme "patte d'éléphant", les forme "bootcut" accentués, que l'on revoit ou que l'on a revus en tendance légère ces dernières années également.
Et les couleurs ? Ben ... avouez que notre mode actuelle, elle est plutôt flashy ces derniers temps, non ? Et la comparaison peut même aller plus loin, pensez aux bas collants et ou nylon fantaisie, bien colorés que nous avons connus à cette époque et qui sont revenus en force, depuis quelques hivers.
Vous me rétorquerez que pour autant, même si certaines formes et couleurs sont revenues, ou ont inspiré les créateurs actuels, (la mode étant un perpétuel renouvellement), on ne porte plus de diolen.
FAUX !
Certes, le lycra (autre appellation contrôlée passée dans notre langage), et tous les tissus jersey auxquels il est incorporé ont changé notre existence, mais ... n'allez surtout pas croire que cette fibre n'existe plus.
En fait, tout est parti d'une discussion vestimentaire entre Délicieux Mari et moi. Il y a quelques années, lorsque nous nous sommes rencontrés, il m'a avoué avoir recyclé en "loques de bricolage" absolument tous ses Tshirts en coton, les délaissant pour des Tshirts en matière synthétique achetés en magasin de sport.
Voyant mon air étonné, il m'a expliqué qu'au labo, à cause des appareils d'analyse, il fait toujours très chaud, et qu'en outre, il passe son temps à courir d'un coin à l'autre de ce vaste plateau d'analyse, volant d'une machine à l'autre pour les surveiller en cours de route. Résultat des courses, il est en nage la plus grosse partie de la journée. Et quand on transpire beaucoup, le coton, ça met longtemps à sécher, du coup on prend plus vite froid selon lui. A l'avènement des Tshirts synthétiques pour joggeurs, il a eu l'idée de les tester au quotidien. Et s'est rendu compte que cette fibre synthétique légère séchait très vite et donc était finalement nettement mieux adaptée à sa vie active que les vêtements plus traditionnels.
Si vous y réfléchissez bien, c'est au niveau du tissage (et parfois, mais pas toujours, de l'ajout d'un peu de lycra) que les choses ont le plus changé. Mais la fibre synthétique fait plus que jamais partie intégrante de notre quotidien.
Autre point, en effectuant quelques recherches sur le net, je me suis aperçue que la fibre "diolen" existe toujours, sert toujours à des fins vestimentaires mais pas que pour ça. Je vous passe les dérivés complexes et malheureusement très utiles de ce synthétique parmi tant d'autres. (Je dis malheureusement car ces produits sont issus à la base du pétrole, ne l'oublions pas!).
Cette fibre a suscité un regain d'intérêt de ma part lorsque j'ai découvert dans un magasin local des stocks de coupons de tissus de "ces années-là". Et très curieusement, alors que certaines matières synthétiques "meurent", se désagrègent ou perdent leurs qualités, ces coupons de tissu, visiblement vieux de minimum 3 voire 4 décennies, étaient toujours intacts. Pourtant stockés dans des conditions douteuses, m'a confirmé le vendeur, qui venait d'en racheter un grand lot. Ces tissus, bien que plus au goût du jour, n'avaient pas bougé.
J'étais trop petite pour me souvenir de l'ambiance des années 60 et 70, mais Délicieux Mari, né en 1960, se souvient très nettement d'une ambiance fort insouciante et d'un gigantesque gaspillage en tout. Ses parents, assez âgés, étaient concierges dans un complexe d'appartements sociaux, possédaient encore des valeurs de "gens qui ont vécu la guerre" ... mais ... "Les gens achetaient, jetaient, rachetaient, avec exubérance, et sans aucune conscience à ce moment, de l'immense impact écologique de leur insouciance" se souvient-il. Il passait notamment son temps libre, enfant, à faire les poubelles et à écumer les décharges à air libre, avec ses copains, afin de découvrir des "trésors" (oui, je sais, oups, ça fait peur rétrospectivement !)... et des trésors, neufs ou quasi, ils trouvaient tout le temps.
En caricaturant la situation, voici comment je perçois notre époque actuelle, grosso modo :
Actuellement, on agite le spectre de la disparition des produits pétroliers, on crie au gaspillage d'énergie, on met à jour d'énormes scandales alimentaires ou médicamenteux .. Nous vivons une époque très contrastée dans laquelle une certaine population, éduquée ou non, se ferme les oreilles, se dore la pilule, prend si possible plusieurs fois par an des vacances très très loin de son domicile, en avion bien sûr, se fiche pas mal d'économiser l'eau, de bien trier ses déchets, d'opter pour des comportements écologiquement et économiquement responsables ou même d'avoir un comportement un tout petit peu moins gaspilleur ou dépensier.
D'un autre côté, il y a une frange d'écolos purs et durs, dont je ne fais pas partie, la faute à mon manque de stoïcisme (la bicyclette sinon rien, ne pas se chauffer et se laver à l'eau froide, pour l'instant, c'est encore beaucoup me demander).
Et puis au milieu, des tas de gens comme vous et moi, qui voudraient bien faire quelque chose, qui petit à petit changent leurs habitudes, mais ... qui font bel et bien partie de leur époque et consomment aussi les produits "de maintenant".
Et bien souvent, un des petits gestes que nous posons le plus facilement, surtout si nous sommes pourvus d'imagination, c'est le recyclage, c'est de jeter un peu moins vite qu'avant sans doute, pour prolonger la vie de l'objet voire lui donner une seconde existence radicalement différente de l'usage qu'il a connu.
Il suffit de jeter un œil sur toute l'imagination déployée en la matière sur les blogs, je trouve cet état d'esprit rafraîchissant et très très enthousiasmant, perso.
Toujours intriguée par les recyclages possibles, j'ai été émue, l'autre jour, devant ces tas de tissus oubliés, critiqués, et moqués. Pauvres petits coupons "diolen" abandonnés de tous, vous ne méritez pas une telle vindicte populaire, vous qui êtes si faciles à porter et à entretenir, vous dont les ancêtres ont facilité la tâche de nos mères et grand-mères !
Et si j'organisais pour vous une réhabilitation en bonne et due forme ?
Et si je prouvais à la blogosphère (du moins à mon petit cercle de lectrices) que, non, le Diolen des sixties-seventies n'est pas juste bon à mettre à la poubelle ?
Vous me suivez toujours ? Alors, suite aux prochains épisodes !